Depuis plusieurs années que je suis Marie Cochard de La cabane antigaspi, j’ai toujours apprécié son approche ludique et poétique du zéro déchet. Lorsque j’ai vu qu’elle lançait un nouveau projet de revue autour du féminin sacré, j’ai pressenti que nous avions toutes les deux en commun ce cheminement de l’écologie militante vers une écologie intérieure plus fine. J’ai apprécié la simplicité de Marie. Notre échange a été spontané, profond et à la fois très léger entre spiritualité, engagement écologique, échange de recettes, nos aspirations de mamans et cette foi inébranlable dans le collectif qui chaque jour participe à un monde respectueux des hommes et de la nature.
Maeva: Bonjour Marie, Peux-tu te présenter en quelques mots ? (toi, ton parcours, ton univers)
Marie: Bonjour! j’ai commencé dans le journalisme il y a 12 ans dans le milieu culturel d’abord puis j’ai travaillé pour la revue canadienne Pure Green. J’ai découvert un éco-art de vivre qui m’a de suite parlé! Ce fut vraiment une révélation pour moi qui est allée de paire avec mes aspirations de jeune maman. Il y a sept ans, lors de ma première grossesse, j’ai vécu toute une remise en question de mon mode de vie, j’ai eu notamment envie de renouer avec ce que j’avais connu enfant pour le transmettre à mon tour: les cueillettes chez mes grands parents, le séchage des plante pour les tisanes, etc. Cela a aussi changé mon rapport à mon travail, il est devenu évident que tout ce que j’écrivais devait être en accord avec mes valeurs. C’est comme cela qu’est née la Cabanne anti-gaspi.
Maeva: Tu es l’auteure de deux livres “Notre aventure sans frigo” et un livres de recettes avec des épluchures. Quel était ton envie avec ces deux ouvrages?
Marie: Dans chacun de mes livres j’ai travaillé sur le savoir des anciens. Notre système de production et de consommation nous a littéralement coupé d’un savoir ancestral très intelligent. Nos grands-parents laissaient la précieuse peau des pommes de terre lors de la cuisson ou encore les pommes entières qui sortaient du four à l’heure du gouter! De là est née mon envie du livre sur les épluchures puis celui sur notre aventure sans frigo qui va avec un changement de consommation. En effet, si je ne consomme pas de produits transformés, moins de viandes et de produits laitiers, ais-je encore besoin de mon frigo? A chaque fois, j’ai eu l’envie de proposer des livres ludiques et beaux, grâce aux photos de mon compagnon Olivier Cochard, pour donner envie et aussi pour montrer que de le changement d’habitudes n’est pas une régression mais au contraire quelque chose de très créatif! Et j’ai vraiment cheminer avec ces livres. Par exemple, avec notre aventure sans frigo, j’ai vécu une véritable reconnexion à mes sens : le toucher, le parfum, j’ai aussi appris à me faire confiance. On a besoin d’experts pour tout, les dates limites de consommation, le médecin pour accoucher, etc. il y a une externalisation de l’inné. Or, se faire confiance, réutiliser ses sens premiers c’est très primitif et cela participe à une réappropriation des savoirs et aussi, pour moi, la sensation progressive de réintégrer mon corps.
Maeva: Aujourd’hui, tu lances ton nouveau projet, la revue Druidéesse, actuellement en campagne sur Ulule, peux-tu nous en parler?
Marie: Le projet est né en octobre dernier. Nous étions au Canada pour présenter notre livre Notre aventure sans frigo. Il correspond à un moment de ma vie où je réalise que mon écologie était jusqu’alors très extérieure et progressivement elle s’est fait plus intérieure. J’ai pris conscience qu’il y a deux communautés qui se côtoient sans vraiment se rencontrer: les écologistes qui sèment des graines grâce à leur mode de vie, les éco-gestes du quotidien; et les personnes qui cultivent leur écologie intérieure grâce au développement personnel, au yoga, etc. Pour moi c’est une évidence de réunir les deux et Druidéesse est pensé comme une passerelle entre ces deux univers.
Au début, je voulais le sortir pour le solstice d’été pour la symbolique du rayonnement et de l’éclosion du projet. A l’origine, nous faisions tout de A à Z avec Olivier, donc c’était impossible en terme de délais! Et finalement le projet a évolué de manière très jolie en devenant notamment un projet collectif. Je ne suis pas fan des campagnes de financement car j’assimilais cela à “demander de l’argent”, mais une amie a attiré mon attention sur le fait que c’était dommage que les gens ne participent pas au projet. On a donc lancé une campagne sur Ulule et c’est incroyable tout ce qui s’est passé! Il y a un tel engouement pour le projet, je reçois des messages encourageants tous les jours, les gens attendent vraiment que le premier numéro sorte. C’est la première fois que je me laisse porter par un projet. Habituellement, je couve mes projets comme on porte un bébé, je les garde au chaud et secret. Et je suis vraiment fascinée par l’aspect collégial qu’a prit Duidéesse. Cela correspond à un moment de ma vie où, depuis un an, j’apprends à lâcher-prise grâce notamment au yoga qui participe à me reconnecter à mon corps de femme, à mon yin doux et créatif par rapport à mon yang très volontariste et dans l’action. J’aime l’ouverture aux autres que ce projet à provoqué : des contributeurs viennent naturellement à moi et j’ai envie de leur laisser l’espace, alors qu’au début je pensais tout écrire dans la revue! C’est une respiration collective, une inspiration-aspiration commune.
Finalement ce projet est une éclosion, il aura fallut du temps pour que tout soit juste. Symboliquement, le premier numéro va sortir à l’équinoxe d’automne qui est le temps des récoltes, de l’intériorité, le moment où l’on a envie de se musser chez soi avec une belle revue et une bonne tisane. On a travailler au printemps, période des semis; la campagne Ulule à donner une énergie solaire pour le déploiement du projet, et nous récoltons à l’automne. J’ai appris que lorsque l’on lâche-prise, tout s’aligne, tout est juste.
Pour résumer, mon envie avec Duidéesse est de proposer une revue qui fait du bien pour que les gens se reconnecte à la Terre et à leur nature profonde à travers elle. Et comme pour mes précédents ouvrages, j’avais envie d’un bel objet, mettre en avant la beauté de la nature.
Maeva: De l’éco-responsabilité à l’écospiritualité, il n’y a qu’un pas ?
Quel lien fais-tu ?
Marie: La frontière est hyper fine et je ne sais même pas si il y a une frontière en fait! Beaucoup de personne ont une spiritualité sans mettre de mots dessus, sans la conscientiser. Mais de fait, il faut avoir la foi pour croire qu’un autre monde est possible. En étant spirituel, par des gestes quotidiens, l’envie de prendre soin, tu peux avoir des éco-gestes. Les deux sont très imbriqués mais pour beaucoup ce n’est pas flagrant.
Maeva: Druidéesse met la femme au cœur de ce processus. Les femmes sont-elles selon toi les gardiennes de la Terre ? Je pense à des figures archétypales comme la sorcière, la fée dans les légendes celtiques. Finalement celle qui détient un savoir (les remèdes), la gardienne de la sagesse aussi.
Marie: A l’origine du projet oui! Je voulais un magasine pour les femmes. Je ne pensais pas faire des portraits d’hommes. Petit à petit, je me suis ouverte sur le fait que ce ne devait pas être un magasine que pour les femmes, écrits par des femmes. Déjà, parce que c’est un projet de cœur que je mène avec mon compagnon et aussi car c’est une évidence pour moi aujourd’hui que le féminin sacrée est liée au masculin sacré. Finalement l’enjeu est de remettre du sacré dans nos vies. Progressivement des figures d’hommes ont émergées comme Jean-Sébastien Rossbach qui travaille sur les femmes chamanes et qui offre un conte dans le premier numéro. Il y aura aussi un druide qui voit le sacré en toute chose. Le titre de la revue est le reflet de ce féminin et masculin sacrés qui avancent ensemble: je pensais à “Druidesse” au départ, puis Olivier à proposé “Druidéesse” et j’ai adoré cet ajout du féminin au masculin!
Maeva: Quelle est ta vison de l’avenir (tes espoirs, ton utopie) ?
Marie: Je n’imagine pas demain, j’essaye d’être dans l’instant présent et de me laisser porter. J’ai juste envie d’avancer en confiance.
Maeva: Quels sont tes rituels au quotidien pour cultiver l’émerveillement et la simplicité ?
Marie: Je pratique la gratitude le matin. Chaque matin une vie redémarre: je suis en vie, une nouvelle journée commence, j’ai plein de chose à faire, etc. J’aime aller marcher pieds nus dans l’herbe mouillée, écouter le chant des oiseaux. Et je vis connectée à la lune, j’aime beaucoup les rituels à la lune : je poses mes intentions à la nouvelle lune et je fais le bilan à la pleine lune en m’entourant de pierres, de coquillages… J’ai la chance d’avoir ma chambre positionnée dans l’axe de la pleine lune, je la voit depuis la baie vitrée de la pièce, je suis donc vraiment en connexion avec elle.
Maeva: As-tu un mantra, une citation qui t’accompagne au quotidien ?
Marie: “Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette pas.” Oscar Wild
Et en ce moment, j’écoute ce mantra qui s’accompagne d’un geste sacré des mains qui symbolise les quatre saisons. Les quatre saisons, les quatre phases du cycle féminin, je sens pour moi et pour les femmes en général une envie de descendre dans nos profondeurs, dans nos ventres, dans nos utérus. C’est un réveil collectif et cela me touche qu’on chemine toutes de façon différente mais avec un même élan, presque de l’ordre de la survie, la femme louve en soi.
Aller plus loin :
La campagne Ulule pour Druidéesse se termine dans 3 JOURS donc si vous avez envie de contribuer à ce superbe projet, c’est par ici !
Découvrez le blog La cabane anti-gaspi
Et suivez l’univers et les actus de Marie et d’Olivier sur leurs comptes Instagram.